La décision des députés de la Majorité parlementaire de ne pas accueillir le ministre du Budget est irresponsable, inacceptable et relève d’une forfaiture qui risque d’installer le Sénégal dans une impasse politique lourde de conséquences pour le pays.
De quoi s’est-il agi ? D’une réponse informelle du Premier ministre à un député de sa coalition, l’intimant de ne pas se présenter devant la représentation nationale tant qu’un nouveau Règlement intérieur n’est pas voté. Il s’agit d’une prise de position individuelle (celle d’un député qui engage sa seule personne) à laquelle le Premier ministre aurait pu ne pas répondre. Mais ce serait dans le même temps manquer d’élégance, l’interpellation venant après tout d’un député investi de la légitimité populaire. Ce à quoi le Premier ministre a répondu par un « Si ». Tout est là ! Ousmane Sonko n’a à aucun moment, en aucun cas, déclaré qu’il ne se soumettrait pas à l’exercice de Déclaration de politique générale auquel la Constitution du Sénégal l’oblige. Il est si attaché à cet exercice, qu’il répond à son interlocuteur que si une solution n’était pas trouvée, il le ferait devant un Jury populaire.
Qu’il soit compris que cet exercice, quelle que sera sa portée, n’aurait qu’un caractère symbolique, populaire, mais ne serait d’aucune légalité et ne saurait soustraire le nouveau Premier ministre de l’obligation de faire sa déclaration de politique générale en temps opportun.
Seulement en Droit, la Constitution affirme, et la Loi organique précise et organise. Dans le cas d’espace, les députés de l’opposition parlementaire ont bien raison de pointer qu’aucune disposition n’est prévue, enfermant le Premier ministre dans des délais. Si ces dispositions existaient, elles avaient été abrogées à la suppression du poste de Premier ministre et n’avaient jamais été remplacées, disons rétablies pour ce cas-ci. Voilà pourquoi la meilleure lecture de la réponse du Premier ministre au député Guy Marius Sagna, c’était l’impératif pour l’Assemblée nationale, de se réunir pour se doter, le temps d’une demi-journée, d’un Règlement réintroduisant les dispositions concernant le Premier ministre. Puisque jamais Ousmane Sonko n’a affirmé qu’il ne se soumettrait pas à son obligation de déclaration de Politique générale et de surcroît, n’a exprimé son avis que de manière informelle. Ce qui, pour le Parlement, ne peut servir de base à une décision puisque ne revêtant aucun caractère administratif ou officiel. Le Premier ministre s’adresse au Président de l’Assemblée nationale selon des modalités formelles bien précisées. Le Président de l’Assemblée nationale aurait pu, à son initiative, inviter le Premier ministre à s’exécuter et attendre sa réponse. Par ailleurs, la décision de ne pas accueillir le débat d’orientation générale n’a aucun fondement légal, n’étant prévu par aucune disposition du Règlement intérieur de l’Assemblée nationale.
Les députés, si tant est qu’ils ont cherché à réagir une prétendue illégalité, on voulu répondre à une illégalité par une autre illégalité. Ce qui, en l’espèce, ne se justifie pas puisque le Premier ministre Sonko n’a commis aucune illégalité. La Constitution à laquelle il doit se conformer, ne l’enferme pas dans un délai formel. Et même si les députés venaient à voter un nouveau Règlement intérieur, il ne s’appliquerait pas à lui rétroactivement. D’où il ressort que les députés de l’opposition ont agi en toute illégalité et viennent d’engager le pays entier dans un bras de fer qui risque de compromettre le marathon budgétaire pour l’exercice 2025 qui devraient débuter au mois d’octobre 2024.
Jambaar DIOP
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